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La Poste innove avec la mise en vente lundi 18 septembre de ses premiers « crypto-timbres ».
Publié le 16 septembre 2023 à 19h45, modifié le 18 septembre 2023 à 14h44 Temps de Lecture 6 min.
La Poste met en vente générale, le 18 septembre, son premier timbre NFT, un « NFTimbre » légendé #NFTimbre1, qui associe un timbre-poste classique et son image numérique, un NFT (« non-fungible token »), c’est-à-dire son jumeau en format numérique, tiré à 100 000 exemplaires.
Un événement qui s’inscrit dans les grandes heures de la philatélie.
Sa valeur faciale se monte à 8 euros – la transaction se fait uniquement en euro, pas en cryptomonnaie pour simplifier l’accès des philatélistes au produit – et ne correspond donc à aucun tarif postal, si l’acheteur souhaite utiliser la version « papier » du timbre pour affranchir un courrier, ce qui est à l’origine tout de même sa vocation !
Il faudra, par exemple, ajouter un complément d’affranchissement de :
– 0,85 euro pour une lettre verte d’un poids de 1 à 2 kilogrammes ;
– 0,38 euro pour une lettre recommandée en R1 de 100 à 250 grammes ;
– 0,52 euro pour une lettre en R1 de 50 à 100 grammes avec avis de réception…
Ce jeton « non fongible », c’est-à-dire non interchangeable, impérissable et irremplaçable, fait office de titre de propriété numérique, associé à un bien original unique, numéroté, qu’un seul détenteur possède, en l’occurrence ici un timbre-poste.
Une plate-forme dédiée
Comme le souligne la rédactrice en chef d’Atout timbres, « reste que le vrai timbre, le seul disposant du pouvoir d’affranchissement, est celui en papier, son double numérique ayant, pour l’heure, plutôt une fonction de certificat d’authenticité ».
La Poste s’est associée à l’agence de développement technique Wagmi pour développer la plate-forme NFTimbre et le NFT, enregistré sur la blockchain Tezos.
A noter que La Poste n’est pas complètement débutante sur le sujet, puisqu’en 2022 elle avait lancé une collection de NFT photographiques sur Binance pour récolter de l’argent au profit de la Croix-Rouge française. Et qu’en mars 2023, La Poste Ventures a décidé d’investir dans une start-up blockchain française du nom de Carbonable.
Les amateurs peuvent ainsi, depuis le 21 août, se pré-inscrire pour ensuite acheter ce NFTimbre inséré dans un bloc vendu au prix de 8 euros sur une plate-forme dédiée, l’unique réseau de vente de ce nouveau produit. La Poste explique que la vente « premier jour » de ce timbre se déroulera le 18 septembre, exclusivement via sa plate-forme. « Les achats effectués à cette date seront certifiés du “premier jour” via le NFT lui-même ». L’activation du NFT permettra en outre à son propriétaire de découvrir une version numérique animée du bloc. « Le NFT permettra d’offrir une identification unique de chaque timbre, facilitant son authentification et donc sa valeur future de revente entre collectionneurs. »
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Frédéric Morin, le directeur adjoint de Philaposte (la direction de La Poste chargée de concevoir et de commercialiser le programme philatélique annuel), explique que La Poste ne pouvait pas être absente de ce marché qui se développe depuis quelques années à l’étranger, avec un certain succès. Pour la France, c’est la commande du timbre NFT qui activera simultanément sa version numérique, à la différence de certains offices postaux étrangers qui dissocient les deux manœuvres d’achat, entraînant parfois des « pertes ».
L’artiste Faunesque
A l’heure actuelle, selon M. Morin, plus de 10 000 réservations ont été effectuées. « Tous ceux qui attendent le lundi 18 septembre pour se préinscrire risquent d’arriver trop tard », explique-t-il selon l’adage « premier arrivé, premier servi ». On peut en effet imaginer que les préinscrits ne se limiteront pas à un seul achat.
Il souligne que les frais d’envoi sont offerts dès l’achat de deux NFTimbres, et que le tirage de 100 000 exemplaires a été fixé en concertation avec la Fédération française des associations philatéliques (FFAP) et la Chambre syndicale française des négociants et experts en philatélie. « Il n’y aura pas de réimpression », insiste-t-il.
La Poste prévoit trois autres émissions d’ici à la fin 2024.
Pour ce premier bloc, l’artiste Faunesque (alias Phil Constantinesco) a choisi d’évoquer l’univers de la correspondance.
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Le dessin assez « classique » (dans un style qui évoque Takashi Murakami ou James Jean) présente ainsi un tourbillon d’objets sortant d’une boîte aux lettres : cartes postales, enveloppes, courriers administratifs, lettres d’amour, stylo-plume, crayon à papier, tampon encreur… Le facteur sur son vélo électrique semble voler pour transmettre les messages. Les fleurs renvoient à la nature, qui a toujours été une des sources d’inspiration de l’artiste qui vit aujourd’hui à Bruxelles et travaille pour de nombreux magazines, de Marie-Claire, à Phosphore, en passant par Psychologies Magazine, L’Express, Télérama…
L’objet « physique » sur lequel s’affiche sa valeur faciale de 8 euros comporte lui-même des caractéristiques innovantes dont une microperforation du terme NFT sur un bloc adhésif, qui identifiera cette nouvelle famille de timbres français.
Gibraltar, Suisse, Féroé, Japon…
La Poste française rejoint le cercle des pays proposant depuis maintenant quelques années des timbres NFT comme Gibraltar (le tout premier crypto-timbre, dès 2018), l’Autriche (qui a franchi la barre du million d’exemplaires vendus), la Suisse (des « Swiss Crypto Stamps » pour lesquels Swiss Post annonce des ventes aux enchères !), la Croatie, le Portugal, les îles Féroé, les Nations unies ou le Japon. Une liste de pays que tient à jour The Digital Philatelist.
La spéculation ne manque pas d’accompagner ce phénomène de mode dont témoignent certains prix atteints sur les sites de vente spécialisés, les services philatéliques des offices postaux se trouvant parfois rapidement en rupture de stocks. Pour limiter les risques, les commandes du timbre NFT sont limitées à cinquante exemplaires.
Quelles sont les caractéristiques de ce NFTimbre, selon La Poste ?
– La preuve d’origine : un NFT apporte une donnée certifiée sur son origine. Il permet de vérifier un auteur et de mettre en place des cas d’utilisation. Détenir un NFT, c’est avoir une preuve de son origine. Il bénéficie d’une numérotation unique (un code alphanumérique) enregistrée dans la blockchain Tezos.
– Horodatage : chaque action sur un NFT (création, transfert, modification) est inscrite dans la blockchain.
– Qualification : il est possible d’attacher des qualités immuables à un NFT, qui le suivront tout au long de sa vie. Exemple : achat lors du premier jour de son émission.
– La possession unique : un NFT ne peut être détenu que par une seule personne à la fois, car il ne peut être dupliqué. Cependant, un NFTimbre peut être transféré d’une personne à une autre et conserver ses caractéristiques.
« Un impact carbone »
Le mensuel L’Echo de la timbrologie de septembre ne manque cependant pas de noter que « comme n’importe quel autre objet numérique, et bien que des systèmes de protection aient été mis en place, il court le risque de subir des piratages informatiques. De plus, les systèmes de sauvegarde numérique évoluent très vite et certains, jugés obsolètes, pourraient être abandonnés au profit d’autres plus performants ».
Enfin, le journal spécialisé rappelle que « le stockage dans des bases de données a un impact carbone (…) ». De manière moins écologique, Philaposte a généré 900 000 timbres NFT dont 800 000 ont été détruits – garantissant ainsi le côté aléatoire des codes produits – sans les stocker, manœuvre la plus énergivore.
Alors, pourquoi l’acheter ?
La Poste explique que « réalisé par un artiste, votre timbre est une pièce qui a toute sa place dans votre collection. Vous pouvez le ranger, l’encadrer, l’échanger. Grâce à son jumeau numérique, vous pouvez l’admirer sur écran, en mode HD ou en image animée.
C’est un objet pérenne que vous pouvez transmettre et vendre. Référencé chez Yvert et Tellier, votre timbre prend de la valeur au fil du temps, comme n’importe quel timbre classique. Le certificat de propriété associé au jumeau numérique confère une valeur supplémentaire à l’objet.
Avec les timbres NFT, vous suivez en direct le nombre de timbres effectivement vendus. Vous savez par exemple que vous avez acheté le N° 999 de la série. Bien sûr, le NFT vous donne aussi la preuve irréfutable que vous avez acheté un timbre du “premier jour” » de sa mise en service.
Des frais
Frédéric Morin signale tout de même qu’il faut s’attendre « à ce que des frais [des frais de gaz] à terme soient prélevés sur les transactions de NFT », mais « pas avant 24 mois ». Au profit de Tezos. « On parle de centimes », tient-il à préciser.
N’est-ce pas déjà le cas lorsque des vendeurs utilisent par exemple les services d’eBay, relève-t-il…
Paradoxalement, relève Frédéric Morin, le « premier jour » du timbre NFT – horodaté au jour et à l’heure d’achat – pourrait être moins rare que sa version achetée le lendemain ! Mais encore faut-il que les 100 000 exemplaires n’aient pas tous été vendus le 18 septembre. Il conseille de tenter d’en acheter le 18 et le 19 !…
Ceci étant dit, « les crypto-timbres débarquent : illusion ou nouvelle collection ? », s’interroge Philapostel Bretagne, qui rappelle au passage que les 175 000 crypto-timbres suisses mis en vente le 25 novembre 2021 étaient épuisés le 26 ! Suscitant un commentaire désabusé : « Les NFT sont de très gros consommateurs énergétiques. Ce n’est vraiment pas dans l’air (pollué) du temps. Quel est l’intérêt des NFT pour des timbres actuels ? A mon avis aucun. Les timbres peuvent être des œuvres d’art, mais cette notion s’est souvent perdue pour la création de nouveaux timbres. Il s’agit simplement d’un effet de mode inutile (…) ».
Ce à quoi l’Union postale universelle (UPU) a répondu de façon très rassurante « au début du printemps » 2023, avec une définition de « la nouvelle génération de timbres numériques » et en établissant une « taxonomie des produits philatéliques numériques » : « Le conseil d’exploitation postale, l’organe technique et opérationnel de l’UPU, a approuvé la toute première série de définitions recommandées pour les timbres numériques, les crypto-timbres et les timbres à jetons non interchangeables (NFT), ce qui constitue un pas important vers la numérisation des supports philatéliques ».
Le prochain Salon philatélique d’automne, organisé du 8 au 10 novembre à l’Espace Champerret, à Paris, accueillera une exposition sur les timbres NFT du monde entier, une première, selon Frédéric Morin, à partir des collections de Luc Mangin, un postier spécialiste de la question.
Pour se procurer ce premier NFTimbre, rendez-vous sur la plate-forme www.NFTimbre.com. Renseignements : 05-53-03-17-44 et [email protected].
Pierre Jullien
Author: Laura West
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